Don't be sad (pv Yama)[rp terminé]

La planète Damas, située dans le système solaire Opale, était plutôt accueillante avec les pirates. En fait, il s'agissait même de l'un des plus gros repères de pirates de la galaxie. Une sorte de Tortuga intergalactique.
Donc, quand le capitaine avait annoncé qu'ils feraient une escale assez longue là-bas, tout l'équipage avait été ravi de la nouvelle. Enfin, jusqu'à ce que Kei leur annonce que la raison de cet arrêt était du à une réparation en urgence du vaisseau et que par conséquent les pirates passeraient la plupart du temps à bord. Là, il y avait eut un magnifique concert de protestations que le capitaine fit taire en un regard. Étrangement, l'équipage relativisa très vite après. Ils pouraient toujours sortir passer du bon temps le soir, non?
Ne s'étant pas sentie concernée par toutes ces histoires, Red était rentrée dans la cuisine pour finir sa sieste. En ce moment, rien ne l'intéressait de toutes façons. Mettant cela sur le compte de la fatigue, elle se recoucha. Enfin jusqu'à ce que Masu ne la reveille pour qu'elle l'aide à faire l'inventaire des réserves. La cuisinière ne faisait pas confiance à grand-monde depuis qu'elle avait découvert que pratiquement tout l'équipage venait se servir la nuit. La jeune fille l'aidait du mieux qu'elle pouvait mais elle se sentait légèrement impuissante face à la situation.
-Il faudra racheter des conserves de légumes, on en a presque plus...Dis Red, tu notes ce que je dis au moins ?
L'hybride sortit de sa rêverie.
-Hein? Désolée, je n'écoutait pas.
-Tu es souvent dans la lune, ces temps-ci. Tu es sûre que ça va?
-Oui, ça va. Je suis juste un peu fatiguée, c'est tout.
L'autre femme ne paraissait pas très convaincue, mais elle laissa couler et reprit son inventaire. Cependant, une fois celui-ci terminé, elle fit quelque chose qui étonna son assistante :
-Donne-moi ça, je te laisse la soirée de libre. Profites-en pour te reposer !
Et sur ces paroles, elle partit en laissant Red bouche bée. Celle-ci en profita pour aller se coucher. Mais quand elle se mit au lit, elle ne put s'endormir. Agacée, elle resta un moment à se tourner et retourner avant d'abandonner et de sortir dans les coursives vêtue de son pyjama rouge. Elle ne croisa personne et se dit qu'ils devaient être sortis boire un verre (et pas qu'un seul). Ses pas la menèrent vers le pont supérieur. Celui-ci était plongé dans le noir, il n'y avait que la lune de Damas, Wel, qui brillait d'une étrange lumière bleue. La jeune femme s'assis par-terre pour mieux la regarder.
Elle savait pourquoi elle n'arrivait pas à dormir et ça lui faisait peur. Parce que ça lui rappelait son "choix" et ses conséquences. Parce que ça lui rappelait Tori.
Depuis qu'elle était sur l'Arcadia, il y avait eu quelques accrochages avec des vaisseaux de la coalition et à chaque fois, elle ressentait la même peur. Celle de le croiser dans la bataille et de devoir tirer. Parce que Tori, malgré son caractère, restait un bon soldat qui n'hésiterait pas à tuer une pirate de son genre.
Red se recroquevilla sur elle-même. Elle était si seule maintenant.

ama, en sifflotant, marchait tranquillement dans le couloir, sa serpillère sur le dos. Normalement, il était débarrassé des corvées de nettoyage depuis que le capitaine l’avait plus ou moins désigné comme son successeur, mais Albator était l’un des seuls auquel il faisait vraiment confiance quand, une ou deux fois par mois, il fallait nettoyer l’ancienne suite de Tôchiro.
Yama faisait partie des gens dans la confidence. Oui, l’ancien ami du capitaine était devenu l’âme de l’Arcadia, mais ce dernier avait du mal à reconnaître sa faute, et il refusait de toucher aux quartiers de son ancien second.
Le jeune homme était mandaté toutes les deux semaines, et, ravi de rendre service, il allait passer un coup de serpillère dans la pièce, changeait les draps et délogeait les araignées.

Il regrettait un peu de ne pas avoir pu sortir avec les autres sur Damas, bien sûr, mais finalement, ce n’étais sans doute pas une grande perte.
Son ascension éclair, en l’espace de quelques semaines à peine, avait fait qu’il n’avait eu que très peu l’occasion de se lier d’amitié avec les membres de l’équipage. Albator passait la nuit dans ses appartements, Kei et Yattaran disputaient une partie de jeu de stratégie dans la leur, et Mimei devait être quelque part dans le générateur.
En bref, il arrivait à se retrouver seul sur un vaisseau pourtant surpeuplé.

Bien décidé à se trouver une occupation constructive en ce début de soirée, il hésita tout d’abord à profiter de l’occasion pour aller chiper dans la réserve de quoi se faire à manger.
Hum, non, mauvaise idée. Primo, vu comment ça c’était terminé la dernière fois, ce n’était peut-être pas indispensable de recommencer. Ensuite, Masu n’était certainement pas descendue, et Yama pouvait parier qu’elle montait la garde devant la porte de la soute avec un rouleau à pâtisserie, prête à assommer le premier qui ferait mine de s’intéresser aux provisions.

Il opta finalement pour une solution plus simple. Étant donné qu’il avait son matériel de nettoyage sur lui, il pouvait toujours aller passer un petit coup sur le pont supérieur, et en profiter pour vider une des bouteilles de la réserve de Yattaran, avec vue sur les étoiles en prime.
Oui, c’était définitivement une bonne idée.
Il ramassa son seau plein d’eau, et étira un peu son dos voûté. Puis il emprunta le chemin conduisant au pont.

Les couloirs étaient définitivement déserts. Ce serait un miracle si tous les membres de l’équipage retrouvaient le chemin du vaisseau, avec la quantité d’alcool qu’ils auraient dans le sang, à la fin de la nuit...
Il fut donc très surpris de trouver quelqu’un sur le pont. Et encore plus de reconnaître une fille, à l’apparence assez jeune. Il s’aperçut assez vite qu’il ne connaissait même pas son nom.

-Tu es... de quart ? tenta-t-il en résistant à l’envie de se passer une main dans les cheveux pour remettre sa mèche en place.

Il se rendit lui-même compte du ridicule de sa question. On prenait rarement son tour de quart en pyjama, aussi joli soit-il.
Et aussi jolie soit-on, en passant.

-Quelque chose ne va pas ? demanda-t-il d’une voix plus douce.

[Tu vois que j'en suis capable ^^ je peux éditer si ça ne te va pas !]

Red était plongée dans ses sombres pensées quand elle entendit quelqu'un lui parler. Elle se retourna pour voir un jeune homme en face d'elle qui avait l'air aussi étonné qu'elle de trouver quelqu'un ici.
Étrangement, le visage de l'autre lui paraissait familier. Pourtant ce n'était pas tous les jours que l'on pouvait croiser un homme avec une telle balafre et un oeil en moins. Mécheux en plus de ça. S'il avait été plus grand et habillé de noir, il aurait pu se faire passer pour le capitaine assez facilement en fait.
La jeune hybride espérait très sincèrement qu'il n'avait le même caractère ou la même proportion à enlever les pauvres jeunes filles innocentes (enfin presques innocentes parce que bon, elle était quand même un ancien soldat) que celui-ci. En tous cas, il semblait déjà un peu plus bavard.
Remarquant enfin qu'il fallait qu'elle lui réponde elle bafouilla:
-Je...Oui, tout va bien ! Je suis juste venue...voir les étoiles ! Vous ne trouvez pas qu'elles sont belles ce soir ?
La jeune fille sentait bien qu'elle s'enfonçait de plus en plus. D'habitude, elle n'avait aucun mal à rouler les gens, mais là, elle avait la tête ailleurs. Embarrassée par la situation, elle chercha une issue de secours. Avisant le seau et la serpillère du jeune homme, elle prit son air le plus sincère:
-Oh! Vous êtes là pour faire le menage ! Je ferait mieux de vous laisser alors !

Yama secoua la tête, gêné. La fille était jolie, il ne la connaissait pas, et de surcroît, elle aimait les étoiles et n’était pas sorti boire avec les autres ?
Mais c’était un ange tombé du ciel !

-Non, en fait, fit-il précipitamment en lui posant une main sur l’épaule, je ne suis pas là pour le ménage.

Par réflexe il fit passer sa serpillère dans son dos, et glissa du bout du pied le seau un peu plus loin. Hum, oui. Difficilement crédible d’annoncer qu’on était là pour le Rhum de Yattaran à une inconnue, surtout quand on débarquait avec tout le nécessaire de nettoyage.
Et annoncer «Euh... Beuh non, je promène ma serpillère pour lui faire prendre l’air...» ne risquait pas de remonter sa cote de popularité.

-Bah, tenta-t-il se se justifier avec un sourire maladroit, je donne un coup de main, pour dépanner, mais en vrai, je ne suis plus sensé le faire...

Il braqua sur elle son unique oeil noisette, surpris qu’elle ne l’ait pas reconnu plus vite. Il faisait noir, certes, mais tout de même, son physique était suffisamment proche de celui du capitaine pour que la majorité des membres mettent rapidement un nom sur son visage.
Il leva la tête, et son regard tomba sur l’océan d’étoile qui s’ouvrait devant eux.

-J’aime bien aussi, acquiesça-t-il gentiment. Mais je crois que je préfère... les fleurs.

Il se rendit compte de l’étrangeté de sa déclaration, et choisit de s’asseoir à côté de la fille pour développer sa théorie.

-Les étoiles me font toujours sentit tout petit, et un peu mélancolique. Enfin, moi, je pense toujours à ceux que j’ai laissé, là-bas...

Il fit un signe de tête vers le noir de l’espace, tout en songeant que c’était un demi mensonge. Sa mère et son frère étaient morts. Et Nami... C’était sans doute pour elle également qu’il aimait tant les fleurs.

-Alors qu’une plante... C’est... Je ne sais pas. Cela va sans doute te sembler idiot, mais ça m’évoque la vie, le renouveau, une nouvelle chance. Je trouve les fleurs plus optimistes que les étoiles...

Il se rendit compte en rougissant que lui, qui était tout de même sensé reprendre les commandes de l’Arcadia incessamment sous peu, était tout de même assis par terre en train de parler de fleurs. Il se redressa mal à l’aise, et passa ses mains sur sa veste.

-Je suis désolé, je dois t’embêter. Si tu es venue là, ce n’était sans doute pas pour avoir de la compagnie.

Il hésitait à tourner dans les talons, et à aller nettoyer plus loin, mais d’un autre côté, n’avait pas spécialement envie de passer la soirée seule, surtout maintenant qu’il avait trouvé de la compagnie.
N’osant pas insister auprès de la jeune fille, il lança tout de même :

-Enfin, si je peux te rendre un service, je ne sais pas... Euh... Comment est-ce que tu t’appelles, au fait ?

Red avait été surprise de la tournure qu'avait prise la conversation. Ainsi, il s'était laissé avoir par son bafouillement ? La plupart des autres membres ne se seraient pas laissé conter et quelque part, elle pensait qu'elle préférait la réaction de l'autre. Elle ne se sentait pas capable de survivre à un interrogatoire poussé (surtout si s'était le capitaine qui le faisait...ou pire encore, Masu).
-Je m'appelle Red...Et tu peux rester si tu veux, c'est pas mon vaisseau.
Elle était passée naturellement du vouvoiement au tutoiement, qui lui paraissait tellement plus simple. Le balafré hésita malgré tout.
-Et je n'ai encore mangé personne, tu sais ?
Elle n'avait pas pu s'empêcher de la sortir celle-là. Quelquefois, c'était plus fort qu'elle. Elle avait besoin de taquiner plus ou moins les gens pour apprendre à les connaître.
-En tous cas, ta vision des fleurs est plutôt intéressante. Je n'avais jamais songé qu'on puisse avoir une telle discussion philosophique sur les fleurs. Enfin, pour être honnête, je ne pensais pas avoir ce genre de discussion avec quelqu'un, surtout avec un...humain. Sur ma planète, on utilise les étoiles pour se repérer et lire l'avenir. Mais moi, je n'ai jamais réussi à voir l'un ou l'autre. En fait, je préfère la lune. Peut importe la planète, elle reste toujours aussi mystérieuse...Et pourtant, on sait tellement de choses sur les lunes !
Elle regarda son interlocuteur.
-Mais bon, ça ne veut pas dire que j'ai quelque chose contre les fleurs. C'est juste que je ne connaît pas assez le sujet, sur Mars, on m'a plutôt appris comment me battre...Je suis peut-être passée à côté d'un truc intéressant.
Se rendant compte qu'elle s'était laissé emporter dans son monologue, elle marqua une petite pause pour réfléchir. Elle ne connaissait pas grand-chose de son interlocuteur. Quelle place occupait-il dans le vaisseau ? Pourquoi il n'était pas sorti avac les autres ? En tous cas, il semblait un peu mélancolique par rapport à son ancienne vie. L'hybride se doutait bien qu'on n'embarquait pas sur un vaisseau pirate sans une bonne raison. Et en général, c'était parce qu'on ne voyait pas d'autres issues. D'ailleurs, s'était quoi son nom ? Se rendant compte de sa gaffe, elle brisa le silence:
-Au fait, je t'ai pas demandé, mais c'est quoi ton nom ?

Yama apprécia grandement que la fille -Red, donc- abandonne le vouvoiement. Il reconnaissait tout à fait le fait qu’il serait capitaine un jour, et donc qu’en effet, la totalité de l’équipage lui devrait le respect le plus profond, mais en attendant, entendre des gens de son page, et parfois plus qualifiés que lui, le vouvoyer et s’incliner devant lui, le mettait un peu mal à l’aise.
L’une de ses phrase le fit soudain tiquer. Elle avait dit «avec un humain», et, s’il en croyait son sens très développé de la logique, c’était donc qu’elle ne se considérait pas comme telle.

Il la dévisagea durant quelques secondes. Elle ne ressemblait définitivement pas à Mimei, et pourtant, le capitaine lui avait bien indiqué que les Nibelungen étaient toutes identiques. Non, elle ne ressemblait à aucune des espèces qu’il connaissait, et ainsi, simplement à vue d’oeil, il ne distinguait aucun caractère permettant de l’identifier.
Les cheveux blancs n’était pas particulièrement monnaie courante, mais il avait suffisamment fréquenté la gente féminine pour comprendre que ces dernières pouvaient facilement succomber aux effets de mode.
Elle avait pourtant également parlé de Mars. Et à moins qu’il n’ait raté un épisode, Gaia interdisait autant que possible l’accès aux non-humains. Red était donc probablement une hybride. Ou en tout cas, membre d’une race suffisamment proche pour ne pas être détectée.

-Moi aussi, lui répondit-il en réfléchissant, on m’a appris diverses choses.Tout dépend de qui tu souhaites écouter. Moi... Et bien, si je suis ici, finalement, c’est aussi un peu la faute des fleurs. Il y en a eu deux dans ma vie, et toutes les deux sont...

Il baissa la tête avec tristesse. Ce n’était sans doute pas le bon moment pour parler de cela.

-Enfin, conclut-il. Je ne les reverrais pas de sitôt.

Réalisant qu’il avait au départ voulu réconforter Red qui n’avait pas l’air bien et non lui plomber un peu plus le moral, il préféra répondre à sa seconde question.

-Je m’appelle Yama.

Il croisa les doigts, espérant que si elle devait le reconnaître, elle ne prendrait pas peur. La plupart des hommes du vaisseau le regardaient passer avec crainte, et il regrettait de ne pas pouvoir aller davantage vers eux.

-Si tu veux... Depuis que je suis descendu sur Terre, j’essaie de continuer à faire vivre ces fleurs. Elle sont dans ma suite, je peux te montrer, si tu veux.

[Ben dis-donc, c'est un rapide le Yama ! Il connaît à peine la fille qu'il l'invite déjà dans sa chambre...Il se débrouille bien pour SBAF ! Rend-moi ma place Yatta, c'est moi qui cause]

Yama. Étrangement ce nom lui disait vaguement quelque chose. Elle l'avait sûrement entendu lors d'une discussion entre le capitaine et Yattaran (parfois, dormir dans le couloir, ça a ses aventages). Mais aussi...Lyu. Lyu lui avait parlé de Yama. Pourtant le jeune homme ne ressemblait en rien au portrait que la jeune soigneuse lui avait dressé. Il n'etait pas arrogant, idiot ou flipette (bon, ça elle n'avait pas encore eut le loisir de vérifier). Lyu devait sûrement parler de quelqu'un d'autre...
En tous cas, l'ex-soldat était sûre d'une chose. Les deux "fleurs" dont il avait parlé n'étaient plus de ce monde. Elle avait reconnu cette expression qu'avaient certains enfants de l'orphelinat. En parlant de fleurs, il n'avait parlé de:
-La Terre !? Tu y es vraiment allé ? Je croyais que c'était impossible à cause de...enfin, tu l'as sûrement vu par toi-même. Les fleurs dont tu parle viennent de là-bas ? Ça a l'air plutôt difficile à garder dans un vaisseau...
L'hybride avait des étoiles dans les yeux. Son père, un linguiste renommé, lui avait raconté tellement d'histoires sur cette planète qu'elle lui semblait comme l'un des endroits les plus extraordinaire qui soient. Alors rencontrer quelqu'un qui avait bravé l'autorité de Gaia pour aller dans le sanctuaire sacré et qui en plus, avait rammené des fleurs de cet endroit...Ça tenait vraiment du miracle. Ce Yama venait de gagner le respect de la commise, ce qui était un sacré exploit en soit.
-En tous cas, ça me tenterait bien d'aller jeter un coup d'oeil !

[De un, c'est toi qui te trimballe en pyjama ! De deux, t'as pas dit non ! De trois... va voir sur Mars si j'y suis !]

Le jeune homme se releva en s’appuyant sur son bras droit, puis tendit une main amicale à Red pour l’aider à se relever.
Il nota avec fierté que s’il restait des gars dans le couloirs, ils allaient le voir entrer dans sa chambre avec une jolie fille en pyjama. Ça, ça allait remonter sa cote !
Sûr que ce n’était pas son talent pour le combat qui le faisait briller aux yeux de l’équipage...
Manque de chance pour lui les couloirs étaient purement et simplement déserts. Il se fit avec amertume la réflexion qu’à l’heure qu’il était, tous les marins qu’il aurait voulu impressionner devaient être saouls dans des bars, et pour la plupart d’entre eux, fidèles à leur condition de pirate : en charmante compagnie. Peut-être même, pour ceux qui en avaient les moyens, en charmantes compagnies.

Oh, il n’était pas jaloux, non. Ce n’était vraiment pas son genre, ni comme ça qu’il avait été élevé. Il réalisait seulement un peu plus chaque jour à quel point il était difficile de se faire une place dans un monde qui n’aurait pas dû être le sien.
Il ne regrettait rien, non. Mais parfois, il se sentait un peu mélancolique. Et terriblement fatigué.

Repoussant au fond de lui ses sombres pensées, il préféra se concentrer pour répondre à la question de Red. Il leva les yeux au ciel, réfléchissant.

-C’était... Bah, tu n’as pas dû connaître ça. Ça a été l’unique fois ou l’Arcadia et son capitaine ont été capturés.

Inutile de préciser à cause de qui.

-Je ne sais pas comment tu as pu rater ça, c’est passé sur absolument tous les écrans. Même si t’étais pas encore à bord du vaisseau... Je venais d’apprendre, de mon côté, le véritable sort de la Terre. Et comme la coalition était un peu occupée avec l'exécution d’Albator, tout ça, il n’y avait plus de contrôle...

Il trouva intelligent de faire son fier. Après tout, il était tout de même le futur capitaine, s’il n’avait plus le droit de crâner avec ça, ce n’était pas drôle !

-Si tu veux, je t’emmènerais sur Terre, bientôt ! Dès que j’aurais les commandes du vaisseau... On ira chercher d’autres fleurs !

Un peu naïf, enfantin. Un peu rapide peut-être, avec une fille dont il venait tout juste de faire la connaissance. Mais c’était un bon moyen de rappeler discrètement -vu que la fille avait l’air d’avoir oublié- qu’il était le prochain Albator sur la liste et que ce n’était pas rien.
De toute façon, vu qu’ils arrivaient devant sa suite, il était difficile qu’elle ait des doutes encore longtemps.

Il appuya sur la poignée, et avec ironie, caricaturant involontairement le protocole de Gaia, il s’inclina pour la laisser passer.

-Si mademoiselle veut bien se donner la peine...

Red était un peu étourdie par toutes les informations que lui donnait Yama. Déjà, quand elle était sur Mars, elle avait du mal à suivre les flux de mots que les écrans en tout genres balançaient à longueur de journée. Quelle idée de vouloir savoir autant de choses à la fois ! Elle pensait qu'il lui suffisait d'apprendre l'essentiel et que le reste était purement facultatif. C'est l'une des raisons pour laquelle elle ne regardait jamais les informations et ne notait jamais rien. Si c'était vraiment important, elle s'en souviendrait.
Alors comment le balafré voulait-il qu'elle se souvienne d'un évènement qui était passé sur tous les écrans alors qu'elle ne connaissait même pas le nom d'Albator avant de monter sur l'Arcadia ? Impossible.
C'était un peu comme imaginer le capitaine se faire capturer par Gaia. En fait, la jeune hybride préférait ne pas avoir de détails de cette histoire. Ça lui parraissait trop étrange pour être raconté.
Elle n'avait cpendant pas pu s'empêcher de grimacer quand il avait parler de reprendre les commandes du vaisseau. C'était donc ça, son rôle ici ? Devenir le prochain Albator ? L'ex-soldat espérait que non. Parce que cela voulait dire qu'il finirait aussi froid et amer que l'actuel capitaine et c'était vraiment dommage. Et puis, le capitaine n'était pas tout à fait un humain normal et elle ne voulait pas trop qu'il arrive la même chose au jeune homme, même s'il restait encore un inconnu pour elle.
Ils étaient à présent arrivés du vers les quartiers des gradés, endroit qu'elle tenait à éviter depuis cette sombre histoire impliquant une femme robot, de la peinture bleue et une cheville foulée. Malgré tout, Red suivit le jeune homme jusque devant sa suite et resta un peu perplexe devant ses manières. Est-ce qu'elle avait l'air d'une "demoiselle" de Gaia ? Préférant se taire, elle entra dans la suite et fut assez surprise de ce qu'elle vit.
Après tout, ce n'était pas la première chambre de mec qu'elle voyait (elle allait souvent squatter celle de Tori quand ils préparaient leurs plans de pourrissage de vie) mais celle-ci ne ressemblait en rien à ce qu'elle avait vu auparavant. Elle s'attendait à un minimum de bazar ou au contraire un endroit tenu avec une rigueur quasi-militaire, mais pas à ça.
La suite était sobre, avec très peu d'affaires, à peu près en ordre malgré deux ou trois livres qui trainaient un peu partout dans la suite. L'endroit lui-même ressemblait à une sorte de sanctuaire pour toutes les personnes avides de connaissances. Enfin, c'est ce que pensait la jeune fille qui n'avait pas beaucoup fréquenté ce genre d'endroits. Étrangement, c'était plus interressant que ce à quoi elle s'attendait.
Un peu impressionnée, elle commença à suivre Yama quand son pied droit fit la connaissance avec un objet dur. Elle se baissa pour ramasser l'objet qui s'avera être...un livre. Pourquoi est-ce que les bouquins ne cessaient de poper autour d'elle ? Refoulant dans un coin de sa tête une théorie sur le complot de ces étranges créatures (pour Red, les livres ont une âme, ne cherchez pas la logique), elle passa sa main sur la couverture et lu le titre "Croc Blanc". N'ayant pas une culture littéraure très dévellopée, elle demanda:
-C'est bien ?

Yama laissa passer avec gentillesse Red devant lui, et ferma la porte derrière eux. Il savait comme personne que les soldats de quart, qui passaient à intervalles réguliers devant sa porte, se feraient une joie de jaser sur une telle anecdote qu’une fille dans sa chambre. Premièrement, cela ferait une occasion en or pour Kei et Yattaran de se moquer ouvertement de lui, et ensuite, le capitaine n’apprécierait sans doute pas qu’il passe ainsi du temps avec une des nombreuses filles du vaisseau.
Albator était vite jaloux.

Il se retourna vers Red, et plongea aussitôt une main sous sa mèche, signe évident de sa gène. Il lui prit le livre des mains, en ôta la poussière, et redressa machinalement un coin corné.

-Oh, c’est... Ouais, c’est sympa, comme histoire. Mais c’est très vieux. Et c’est écrit en Anglais, tu ne le lirais pas, je pense.

Il avais ramassé ce livre dans une vieille bibliothèque avant qu’Albator ne donne l’ordre d’y mettre le feu. Il était bien gentil, le capitaine, mais il avait un peu tendance à laisser des ruines derrière lui. Sûr que ses amis à l’Académie des Archéologue pour la Récupération Interstellaire des vestiges en Bon État, la très célèbre AARIBE, devaient se compter sur les doigt de la main...
Yama se demandait même si on avait réellement besoin des doigts de pieds pour dénombrer ses amis tout courts. Amis vivants, bien entendus.

Enfin, c’était tout de même mieux que de compter ses ennemis. Soit on le considérait comme le pire ennemi de Gaia, et dans ce cas, toutes les étoiles du ciel n’auraient suffi. Ou alors, ou prenait uniquement en compte ses ennemis personnels, et là, un manchot cul-de-jatte aurait pu faire le décompte.

Yama se retrouva bêtement à se dandiner nerveusement d’un pied sur l’autre. Il avait trouvé très intelligent d’inviter cette fille à venir dans sa chambre. Après tout, elle avait l’air triste, et, comme n’importe lequel des membres de son équipage, il se sentait responsable d’elle.
Il se demanda à juste titre si il aurait invité Thos ou Treps à venir admirer des fleurs dans sa chambre.
Hum, probablement que non.

Les fleurs !
Ravi de retrouver ce pour quoi il était là, il indiqua galamment à Red où elle pouvait se frayer un chemin dans le désordre ambiant pour gagner la porte du petit salon.
Il ne fallait pas se mentir, sa suite était immense. Les seuls qui n’avaient rien à lui envier était probablement Albator, dont les quartiers étaient tout de même les plus vaste du vaisseau, et Mimei, car même s’il n’y avait jamais été, avait cru comprendre qu’ils n’étaient pas mal non plus.

Yama pouvait annoncer avec une certaine fierté que sa suite dénombrait trois chambres, dont deux d’amis, deux salles de bain, une grande et une petite, et pas moins de six salons, dont le dernier transformé, avec l’aide de Kei et de Mimei, en serre pour ses fleurs.

Il fit pénétrer Red dans cette dernière pièce. Un seul des pans du mur était vitré, et permettait de faire entrer, parfois, un peu de lumière. Le reste du temps, l’éclairage était assuré par des néons à l’éclat le plus proche possible de la lumière naturelle.
Ils avaient déposé de la terre à même le sol, sur l’ancien parquet, et c’était curieux de voir que certaines pièces de l’ancien mobilier restaient en place. Le papier peint bleuâtre était toujours au mur, parsemé de deux ou trois tableaux de paysages. On avait laissé en place le canapé violet, et la table basse en chêne à ses pieds.

Yama fit signe à Red de s’asseoir.
Partout autour d’eux, de longues tiges vertes ou brunes s’élançaient vers le plafond. Les plus hauts plants atteignaient un bon mètres, et quelques fleurs au sol courraient entre les mauvaises herbes. Yama laissait tout pousser sans jamais arracher. Toutes ces plantes étaient précieuses, même les plus communes. Si un jour l’Arcadia se posait sur la Terre, il pourrait essayer d’en ressemer.
Un pied de lierre particulièrement vivace avaient entamé la période escalade du mur de gauche. Une des ses branches venait grignoter l’un des pieds de la table basse, mais Yama trouvait cela amusant. Il n’y avait pas touché pour le moment.

Il se laissa tomber à côté de Red, les mains derrière la nuque.

-Pas terrible, hein ? lança-t-il. Tu veux boire quelque chose ?

Quand Yama avait reprit le livre et avait passé sa main sur sa couverture, Red avait vu l'image d'un autre homme se superposer à la sienne. Celle de son père, qui adorait lire. A chaque fois qu'elle allait le voir dans son bureau, il avait le nez plongé dans l'un d'entre eux mais dès qu'il se rendait compte de sa présence, il relevait la tête et lui souriait gentiment.
La jeune fille esquissa un sourire mélancolique à ce souvenir.
-Oh, c’est... Ouais, c’est sympa, comme histoire. Mais c’est très vieux. Et c’est écrit en Anglais, tu ne le lirais pas, je pense.
Elle avait hésité un moment à avouer au jeune homme qu'elle était en fait trilingue, puis avait décidé de garder ça pour elle. Même si elle usait souvent de la langue de Shakespeare, la plupart des gens pensaient qu'elle se donnait seulement un genre, alors que c'était sa langue "paternelle". Quand au Rakkuennien, elle le parlait en général pour elle, quand elle était seule, parce qu'elle ne voulait pas oublier son héritage.
Elle avait suivit Yama sans vraiment faire attention à ses actions et sentait qu'elle serait incapable de faire le chemin inverse sans y passer au moins cinq minutes. Et encore, ça, c'était si elle n'avait pas trop la flemme...
Aussi, la jeune hybride fut plutôt surprise de l'aspect de la serre personnelle de son supérieur. La nature n'avait que partiellement repris ses droits dans cette pièce encore si...humaine. Mais Red reconnaissait que le jeune homme devait avoir un sacré amour pour les plantes, pour sacrifier une partie de sa suite à elles. C'était un trait de caractère assez peu développé chez les humains en général (surtout dans cette période).
L'ex-soldat s'assis à coté de Yama et observa un peu plus en détail les plantes autour d'elle, ce qui lui permettait d'essayer des penser à autre chose qu'au passé et ses fantômes.
-Pas terrible, hein ? Tu veux boire quelque chose ?
Pas terrible ? Il se moquait d'elle ou quoi ?
-C'est...assez impressionnant. Je ne pensais pas qu'il était possible De faire pousser une telle serre dans un vaisseau !
Elle enregistra la deuxième partie de phrase avec un temps de retard.
-Oh, ça ira, je pense.
Elle lui fit un petit sourire d'excuse tout en passant une main dans ses cheveux pour les ébouriffer.
-Désolée, je ne dois pas être la meilleure des compagnie...J'ai un peu l'esprit ailleurs en ce moment...
Elle baissa la tête, préférant regarder ses mains couvertes de fines cicatrices.
-Je ne sais pas trop pourquoi d'ailleurs...I'm such a moron, sometimes !

Yama ne put retenir un sourire. Elle l’avait bien eut, avec son livre en Anglais. Pour sortir des phrases comme ça, et puis surtout, pour utiliser des mots aussi tordus que «moron», auquel le jeune homme n’aurait jamais pensé comme autre chose que comme une déformation du mot «marron», et bien... Il était prêt à parier qu’elle parlait Anglais mieux que lui.
Il se releva, mal à l’aise. Le second ne se sentait décidément pas doué pour réconforter les gens, surtout les filles. Il se demanda comment aurait bien pu agir le capitaine à sa place. Et se rendit compte qu’il n’en avait pas la moindre idée.
Pourtant, pour un type qui avait recueilli un paquet d’orphelines, dont Kei tout de même, Yama s'imaginait qu’il y avait bien dû avoir un moment où il avait dû réconforter des gamines en pleurs.
Mouais. L’image restait étrange.

Yama se leva et fit le tour du fauteuil. Derrière Red, il posa affectueusement ses mains sur ses épaules, et lui fit lever la tête vers les étoiles.

-Si tu es triste comme ça, mélancolique, c’est parce qu’il y a quelqu’un qui te manque ? Tu devrais parler, tu sais. Tu te sentirais mieux après, je pense. Et si tu ne veux pas me parler à moi, alors on peut aller chercher Kei, ou même le Capitaine, il t’écoutera, je pense.

Il voulut tenter un brin d’ironie.

-Même Mimei, si tu y tiens ! Mais elle, tu sais jamais si elle t’écoute ou si elle se moque de toi...

Il soupira un grand coup. Il se sentait... définitivement inutile. Abandonnant Red quelques secondes dans la serre, il revint deux minutes plus tard avec un plateau portant deux tasses fumantes.

-Je sais que tu as dit que tu ne voulais rien, mais au pire, c’est moi qui boirait les deux tasses. C’est du chocolat chaud maison, même le capitaine me demande la recette !

Et puis surtout, le capitaine ne l’avait pas encore chopé la main dans sa réserve personnelle de chocolat noir pâtissier 75%, sinon, il aurait eu des soucis...
Il prit la première tasse dans ses mains, et soupira.

-Si tu veux savoir, moi aussi je me sentais triste, au début. Parce que moi...

Il hésita un peu. Pouvait-il ainsi se confier à une fille dont il venait à peine de faire la connaissance ?
Oh, et puis après tout...

-Moi, la fille que j’aimais, j’ai réussi à la tuer. J’étais tellement... obsédé par mes fleurs, j’ai fait une bêtise. Elle a passé plusieurs années dans le coma. Mais je voyais encore son hologramme, et puis, elle a même réussi à sauver l’Arcadia en me prévenant à temps des plans de mon frère.

Il sentit un drôle de noeud serrer sa gorge.

-Mais c’est ce qui l’a tuée pour de vrai était... encore plus bête que ça. C’était son amour pour moi. Mon frère n’a pas apprécié. Il l’a débranchée. Clic, morte. Plus personne. Comme quoi tu vois... Et toi, alors ?

Red hésita un moment avant de répondre à la question de Yama. Il fallait dire qu'elle le connaissait à peine, alors lui parler d'un truc aussi intime la rendait mal à l'aise. Mais quelque part, elle sentait qu'il avait raison, il fallait qu'elle en parle à quelqu'un, elle ne pouvait pas garder tout ça pour elle. Le problème, c'était à qui en parler  ?
Masu lui paraissait hors-sujet, elle ne connaissait pas assez Kei (qui n'appréçiait que moyennement son attitude envers le capitaine), Lyu avait ses propres problèmes elle ne voulait pas en rajouter, Yattaran était un gros troll, quand au capitaine....Sérieusement, elle ne se voyait débarquer, la bouche en coeur et lui faire “Je sais que je suis une chieuse qui passe son temps à vous insulter et vous ignorer, mais là je ne vais pas très bien en ce moment, alors vous pourriez me servir de psychologue pendant cinq minutes ?". Non, ce n'était définitivement pas la meilleure chose à faire.
Pour donner une raison à son silence, elle attrapa la deuxième tasse, même si elle n'étais pas fan de sucré, et trempa ses lèvres dedans. Ce n'était pas si mauvais que ça en fait. Elle devrait s'incruster plus souvent. Prenant une inspiration, elle commença:
-En fait, c'est un peu...personnel comme histoire. Je ne l'aie encore jamais racontée à qui que ce soit avant....
L'hybride se tritura nerveusement les mains.
-Ça remonte à quand je vivais encore sur Mars, il y a deux ans, à peu près...Je venais d'entrer dans un pensionnat militaire et je n'avais pas vraiment d'amis là-bas...En partie parce que je n'étais pas comme les autres. Je suis une hybride, expliqua-t-elle au jeune homme, ma mère venait d'une lune appelée Rakkuen, mais mes parents ont du nous confier à la coalition...Enfin, ce n'est pas le sujet. Comme je le disais, je n'avais pas vraiment d'amis là où j'étais...Mais un jour, j'ai rencontré un mec qui était aussi seul que moi. Et bien qu'il soit plus âgé et donc plus expérimenté, je n'aie pas pu m'empêcher de le défier. Et cet imbécile avait eut le culot de m'ignorer ! Sur le moment, ça m'avait vraiment mise en rogne. Puis je me suis rendue compte que si il m'avait ignorée, c'était parce qu'il ne m'avait pas entendue ! Son nom, c'était Sawada Tori, l'un des plus grands tireurs de l'école malgré son handicap. Mais pour moi, ce nom reste comme celui de mon meilleur ami.
La jeune fille eut un sourire triste.
-Lui et moi, on était un peu comme un frère et une soeur. On faisait les quatre cent coups et ça nous attirait pas mal de problèmes, mais on s'en foutait. Tout ce qui nous importait, c'était de ne pas se laisser insulter par les autres. Sauf qu'un jour, ça c'est retourné contre moi. Il y avait un type, le colonel Ross, qui passait son temps à s'acharner sur Tori. À un moment, je ne sais pas pourquoi, mais ça m'a énervée plus que d'habitude et j'ai....J'ai cassé la gueule à un gradé.
Red baissa la tête.
-J'ai été condamnée à perpétuité sur Inferi pour ça. Le vaisseau qui m'emmenait là-bas s'est fait attaquer par l'Arcadia et tu connais la suite...
La jeune fille but une gorgée de chocolat avant d'ajouter:
-Aujourd'hui, ce qui me fait peur, c'est de devoir me trouver face à lui et...d'être obligée de tirer.

Un voile de tristesse tomba sans prévenir sur les yeux de Yama. Il ne s’attendait pas à une histoire si touchante.
Et si... horriblement proche de la sienne.

Se sentant horriblement désolé, mais incapable de savoir comment réagir correctement, il se retrouva à se balancer bêtement d’un pied sur l’autre. Comment on réagissait avec une fille ?
Ou plutôt : comment on réagissait avec une fille qui n’était pas Nami, à savoir qu’il ne connaissais pas comme une soeur, et qui en plus de cela était une hybride d’une race inconnue, et qui pouvait donc potentiellement lui sauter à la gorge ?

Sa jambe gauche le tirait vers la chambre, où il avait un lit confortable et un corps de Dieu une boîte de mouchoirs blancs pleine sur sa table de chevet, et sa moitié gauche plutôt vers le canapé, où la jeune fille aux profonds yeux rouges avait l’air plus en détresse que jamais.
Après un court dialogue interne avec lui-même, il décida que les lois principales de la politesse lui indiquaient plutôt de rester avec son invitée, surtout que cette dernière n’était pas encore en larmes.

Il revint s’asseoir dans le canapé mine de rien, et vida son chocolat d’un trait, la mine sombre.

-J’ai longtemps pensé ça, aussi. Que le pire serait d’avoir à tirer.

Il inspira un grand coup, et se retrouva sans s’en rendre compte à jouer avec le cordon de son cache oeil.

-Mais le capitaine n’est pas un monstre. Il ne te forcera pas à le faire.

Non. Le capitaine tirerait seul, sans l’aide de personne. Il trouverait le bon moment pour l’annoncer à la jeune fille, la laisserait pleurer, lui laisserait le temps de faire son deuil.
Sans regrets.
Yama songea que c’était peut être ça encore la différence entre le capitaine et lui. L’implacabilité d’Albator l’effrayait parfois. Jamais Yama n’aurait été capable de tuer de sang froid un proche d’un des membre de l’équipage, puis de le lui annoncer les yeux dans les yeux sans trembler.

Et il était encore plus effrayé de se dire qu’il allait probablement devenir comme ça un jour. Quand on a vu trop de morts, la plupart ne comptent plus.

-Tu vois, c’est Albator qui a tiré sur mon frère. Je n’ai pas eu à le faire, et même si sur le moment, je lui en ai voulu, et bien finalement... je crois que je lui en suis reconnaissant.

Il réalisa qu’il s’était égaré, et craignit avoir été maladroit. Il posa une main sur le bras de Red, tentant de se rattraper.

-Enfin, j’ai pas dit qu’on allait forcément tirer sur ton ami, hein ! L’espace est tellement grand, on le croisera sans doute jamais ! Ou alors, dans un vaisseau que l’on fera exploser, et tu ne sauras jamais que... Enfin, non, non ! Je ne voulais pas dire... euh...

Il se prit la tête entre les mains, exaspéré par son propre comportement.

-Je suis désolé, je ne fais qu’empirer les choses, pas vrai ? Je ferais mieux de me taire...

Yama se leva pour faire quelques pas, en rond devant le canapé.

-Non, j’ai longtemps réfléchi. Le pire n’est vraiment pas de tirer sur un ami. Ou un frère, ou sur la personne qu’on aime.

Il frissonna à se souvenir, et, lentement, monta la main jusqu’au bandeau qui couvrait son oeil. Il trouva le noeuds très vite, et tira dessus du bout du doigt. Le cuir noir tomba mollement dans sa main, révélant sa plaie encore douloureuse.
La balle avait éraflé son oeil sans le crever. La cornée déchirée, l’iris a nu s’était infecté. Avait viré au rouge, puis au noir. Une tâche d’encre sans forme s’étalait maintenant à la place de son bel oeil noisette.
Yama laissa glisser son doigt le long de la cicatrice qui déchirait sa joue.

-Non, ce qui te réduit le coeur en miette, c’est de réaliser que celui que tu vois comme un frère. Ou pire, celui ou celle que tu aimes... Lui, te tire dessus sans remords.

Il soupira en revenant vers Red.

-C’est mon frère, qui m’a tiré dessus.

[pardon pour la phrase rayée x) J'ai... j'ai craqué ^^]

[XD Tu m'as tuée,chou ! Désolée si la suite tourne beaucoup au mélo]

Red avait senti un frisson glacé lui parcourir les veines quand Yama avait parlé du capitaine. Elle n'avait jamais vu les choses sous cet angle et maintenant qu'elle y pensait, c'était l'une des issues la plus certaine. Après tout, même si il savait toute l'histoire, Albator ne laisserait sûrement pas un soldat de Gaia lui échapper vivant. Surtout si il était un risque potentiel pour son équipage. La jeune femme était désemparée à cette pensée et cela devait se sentir car Yama changea de tactique.
Il défit son cache-oeil. L'ex-soldat avait déjà vu quelques blessures assez horribles, suffisament pour se composer une expression neutre sur le visage en voyant celle-ci, mais cela ne l'empêchait pas de la trouver impressionnante. La douleur avait dût être insuportable sur le coup. Et pas que la douleur d'ailleurs.
-C'est mon frère qui m'a tiré dessus.
Red se sentait désolée pour lui. Elle arrivait sans mal à imaginer ce qu'il devait ressentir. Il allait devoir vivre toute sa vie avec cette marque qui lui rappelerait l'acte de son frère. Elle essaya également d'imaginer Tori, un pistolet dans la main, le fixant avec haine avant de tirer. Mais au fond d'elle, elle savait que cela ne terminerait pas de cette façon. Si jalais Tori devait tirer sur elle, elle n'aurait à peine eut le temps de réagir que la balle se serait logée dans son coeur et elle serait morte avant même que son corps ne touche le sol. Net, précis et efficace.Elle ne saurait même pas qui était le tueur et la réciproque serait sûrement vraie. Après tout, elle n'était oas la seule gamine aux cheveux blancs de la galaxie...
Elle fut tirée de sa pensée morbide par un bruit de tremblement. Elle s'apperçut que c'était ses mains qui tremblaient, serrées autour de sa tasse. L'hybride essaya de la reposer mais avait un peu de mal tellement ses mains étaient secouées de spasmes. Yama vint à son secours avec un air un peu paniqué, elle supposait qu'il se pensait responsabke de son état.
-Merci...
Pour m'avoir aidée, pour me dire tout ça, pour souffrir avec moi. Red aurait voulu lui dire toutes ces choses mais sa voix semblait éteinte. Certaines fois, il valait mieux se passer des mots. La jeune fille réussit cependant à offrir un sourire a son interlocuteur. Mais ce n'était pas un sourire ordinaire. C'était un sourire d'acceptation. Elle le ressentait au plus profond d'elle même maintenant. Quelque soit le chemin que prendrait son destin, elle ne reculerait pas. C'était cette étrange paix qui la faisait trembler. Elle ne n'avait jamais lâché prise aussi violemment.
Quelque chose de mouillé coula sur sa joue. Elle passa sa main, c'était une larme.
-Dé...Désolée...Ça...a pas dût être facile...pou...pour toi aussi...

[Moi, je le trouve juste tout choupinet, ce rp ^^]

Yama se demanda tout d’abord si Red avait un pépin de santé sérieux. Après tout, il était nul en médecine, et quand il était question d’hybride, c’était encore pire.
Préférant la sécurité de son mug «chaton» avant tout, il aida Red à lâcher la tasse, et la reposa bien en sécurité sur la table basse.

Il se dit pour se réconforter que c’était la première fois que son chocolat chaud faisait cet effet là à une fille.

Sauf qu’après ça, il fallut que Red se mette à pleurer.
Yama n’avait pas de soeur, et n’avais jamais côtoyé personne d’autre que Nami. Il n’avait même jamais eu de mère. C’était dire...

-Oh non, il ne faut pas pleurer, tu sais !

Il se sentait chaque seconde qui passait un peu plus inutile et maladroit, et cette sensation était étrangement désagréable. Après tout, il était venu parler à Red parce qu’il pensait pouvoir lui remonter le moral, et lui être un tant soit peu utile.
Alors zut, quoi !

Yama n’était pas du genre à réfléchir. Pas son truc. Kei, Yatta, et même le capitaine pouvaient passer des heures à discuter stratégie, alors qu’il était plutôt du genre à agir et à se poser des questions après.
Et là sur l’instant, il trouva très intelligent de prendre spontanément Red dans ses bras.

Pour évidemment se sentir ridicule la seconde d’après. Encore plus embarrassé si seulement cela était possible, il recula d’un pas, et épousseta sa combinaison pourtant impeccable.
Bon, au moins, elle ne pleurait plus. Il n’y avais pas de petite victoire !

Elle avait l’air absente, et devait sans doute penser à quelque chose d’autre. Et probablement pas quelque chose de très gai, vu ses yeux qui recommençaient à se mouiller de larmes.
Ah non, hein !

Cette fois-ci, Yama hésita moins. Il profita du fait que le jeune fille se soit remise debout pour la serrer contre lui avec force.

-Mais ça n’arrivera pas, lui promit-il à voix basse en frottant son dos avec sa main libre. D’accord ? On ira sur Gaia, on le trouvera, Tori. On lui expliquera tout, il viendra avec nous, si tu veux ! Ou alors on trouvera un moyen de le prévenir de nos attaques pour qu’il se mette à l’abris ! Comme tu veux, je te promet que vous n’aurez pas à vous entretuer, ne pleure plus, d’accord ?

Il le prit par les épaules pour regarder son visage de plus près, et passa un doigt pour effacer les larmes de ses joues.

Après avoir parlé à Yama, le cerveau de Red sembla se déconnecter de la réalité. Elle était à peine consciente de ce qui se passait autour d'elle, quand il la prit dans ses bras pour la première fois. À ce moment là, des images plus vraies que nature d'un combat sanglant entre elle et son meilleur ami lui apparurent et les larmes se remirent à couler.
Cependant, ce deuxième contact avec un être humain sembla la sortir de sa torpeur. La présence de Yama lui parut soudain comme la chose la plus rassurante du monde et elle le laissa faire (en temps normal, elle lui aurait sûrement envoyé un coup de pied bien placé pour son audace).
Ce qui lui disait lui semblait irréalisable mais cela la réconfortait quand même. Après tout, l'espoir fait vivre, non ? Elle le laissa effacer ses larmes et tenta un sourire. Le résultat ne devait pas être concluant puisque le jeune homme semblait toujours la regarder avec cet air à la fois compatissant et paniqué.
La jeune hybride s'éloigna légèrement de l'homme et essuya ce qui restait de larmes. Ses pensées étaient plus claires maintenant et elle s'en voulait un peu de s'être laissée emporter par ses sentiments. Du moins aussi violemment.
Elle regarda un moment son supérieur. Celui-ci était vraiment différent des autres pirates. Il s'interressait aux choses "futiles" comme les fleurs ou la littérature (d'ailleurs il parlait anglais chose rare à leur époque), semblait plus sensible que les autres et surtout on voyait clairement qu'il n'avait aucune expérience avec les filles. Et puis ses manières qui ressortaient parfois sans qu'il ne s'e rende compte... Ce contraste rendait la jeune hybride curieuse. Elle n'avait encore jamais croisé quelqu'un comme Yama. Elle lui sourit, un peu plus sincèrement cette fois.
-Tu sais...C'est vraiment sympa de ta part de m'avoir consolée...
Continuant de sourire, elle avança pour l'enlacer à son tour.
-Merci... T'es vraiment un type bien.
Son sourire se fit soudain un peu plus malicieux.
-Même si il faut sérieusement que tu revoies ta technique de drague !

Yama fut d’abord surpris de voir Red l’enlacer à son tour. Venant d’elle, il se serait plutôt attendu à recevoir une paire de claque ou deux.
Red n’avait pas exactement l’apparence d’un fille super sympa, ouverte, avenante et câline. Par rapport à Lyu pas exemple, le contraste était flagrant.
En revanche si on se fiait à Kei, l’analogie se faisait bien plus facile.

D’abord incertain de la conduite à tenir, il referma bien vites ses bras sur elle avec un sourire. Pour une soirée qui s’annonçait pourrie, il trouvait que finalement, il s’en tirait plutôt bien.

En réalité, il était paniqué comme pas deux.
D’abord, il venait de jurer à une fille rencontrée voilà une heure qu’il allait trahir son capitaine pour elle, et venir en aide à un soldat de la coalition. Il réalisait seulement dans quel pétrin il venait de se fourrer.
Parce que trahir sa promesse, il ne fallait pas y compter. Yama se considérait comme un homme de parole, il n’allait pas déroger à ses principes. Quant à mentir ou à essayer à cacher quelque chose au capitaine, cela relevait du miracle.
Il y aurait donc forcément un moment où il se retrouvait à affronter Albator pour d’un vie d’un soldat de Gaia.

Glups.
Rien qu’à cette idée, il avait envie de filer se planquer dans un lit à l’infirmerie et de ne plus jamais en sortir.
Enfin, sous le couvert d’Eirin, hein. parce que sous le couvert de Lyu, il allait ressortir fissa, et avec une belle marque de pied là où il pensait.

La deuxième chose qui le tracassait sur le moment, c’était plutôt la position de ses mains.
Autour de sa nuque, il allait l’étouffer et lui faire manger son pull, ce qui était moyen. Au niveau des côtes, il trouvait ses mains un peu trop proches de... Aheum, bref.
Yama rougit et descendit un peu. Il espérait que Red soit trop longée dans ses pensées pour remarquer quoi que ce soit d’anormal.
Bon, les reins à présent. Yama déglutit lentement. Pas mieux. Du peu qu’il en savait, ça faisait plutôt couple, autrement dit, pas du tout ce qu’il voulait.
Quant à descendre encore un peu plus bas, il ne voulait même pas y penser.

La phrase de Red le prit de court, et, déconcentré, il en prit les mots au premier degré. Piqué au vif, il sauta sur l’occasion pour reculer d’un bon pas.

-Hey, mais je ne dragu...

Le large sourire de Red lui fit comprendre juste à temps qu’elle essayait juste de se moquer de lui. Il voulut se donner une contenance en secouant nonchalamment la tête, oubliant que son oeil était toujours à nu.
Hum, moyen, ça.
Il étendit un bras discret sur la table où le bandeau était toujours posé, et le renoua discrètement. En plus, ça lui donnait un côté ténébreux.
Comme le capitaine.

Et le capitaine, vu comment il avait du succès auprès des filles, savoir qu’il marchait dans ses pas, c’était plutôt cool.
Yama compta lentement jusqu’à trois pour être sûr de ne pas buter sur la phrase qu’il allait sortir. Question de crédibilité.

-Mais je drague mieux que ça, moi, miss !

-Oh vraiment ?
La jeune fille était clairement amusée par la situation à présent. La réaction de Yama était interessante et elle adorait ce genre d'expérimentations. Et pas de bol pour lui, il ressemblait trop au capitaine pour qu'elle n'essaie pas quelque chose.
-C'est marrant que tu dises ça parce que...
Elle faisait exprès de faire trainer sa phrase tout en s'approchant de lui avec une démarche prédatrice. À cette vue, il recula, ce qui la fit sourire encore plus.
-J'avais une drôle d'impression...
Yama semblait sur le point de s'enfuir en courant, alors elle s'arrêta un instant pour faire semblant de  le dévisager, l'air pensive. En réalité, elle hésitait juste pour la suite. Devait-elle continuer son petit manège ou risquait-elle d'aller trop loin ? Son regard croisa celui du jeune homme. Il paraissait un peu déboussolé par sa nouvelle attitude. Et il était adorable quand il faisait cette tête de martyr...
-Après tout on pourait se tromper sur tes intentions, tu ne crois pas ? Tu m'a emmenée dans ta chambre, tu m'as donné un verre et tu m'as prise dans tes bras. Ce n'est ce que les humains font habituellement pendant un date ?
Elle pencha sa tête sur le côté en prenant une expression confuse.
-À moins que je ne me soie trompée... C'est dommage !
Red eut énormément de mal à garder un air neutre en voyant la tête que faisait Yama. On aurait dit une biche se retrouvant devant un loup affamé. Et elle était le loup. La sensation était particulièrement grisante.
Elle avança encore et il recula jusqu'à rencontrer le mur derrière lui. Il était maintenant pris au piège.
-Attend, Red, ce n'est pas ce que tu crois !
-Et qu'est-ce que je crois, Yama ?
Elle était à présent presque collée à lui et elle pouvait entendre battre le coeur du jeune homme à vive allure. La jeune hybride eut une petite moue, le jeu avait été trop simple.
Rapide, elle mit un doigt sur le nez de son supérieur, qu'il avait fort charmant par ailleurs, et le regarda droit dans l'oeil.
-I don't want to mate with you, Yama. I just want a mate.
Elle recula un peu pour le laisser respirer.
[O.o mais qu'est-ce que j'ai fait ! Pauvre Yama T.T Par contre, je suis contente j'ai casé une référence à DW !]

Yama essaya de faire le tri dans les émotions qui se bousculaient dans son crâne. Après dix secondes de néant absolu, il réussit à synthétiser tout ça une phrase a peu près cohérente :

«Mais bord*l de bon sang de bord*l de zut de m*rde, dans quel pétrin je me suis fourrééééé !»

Il réalisa qu’il devait loucher vu comment Red s’était rapprochée de lui, et que loucher avec un seul devait être parfaitement ridicule.
Mais rien à faire, il n’arrivait pas en même temps à respirer normalement, à calmer les battements de son coeur affolé, à regarder au bon endroit, à reculer pour ne pas se retrouver coincé, et à aligner deux pensées cohérentes.
Par dessus tout, il essayait en vain de comprendre ce que Red voulait. Pourquoi ça devait être compliqué comme ça, une fille, hein ?

Elle se foutait de lui depuis le début et le faisait marcher ? Ou alors, il attendait vraiment de lui qu’il lui roule une pelle là, sur l’instant ?
Après tout, elle avait dit «c’est dommage». Oui, mais venant d’elle...

Et histoire de bien simplifier les choses, Red se mit à causer en Anglais.
Sauf que si Yama était à peu près versé dans la langue britannique, là, sous le coup du stress, son cerveau cessa purement et simplement de fonctionner.
Du coup, il mélangea la moitié des mots, son cerveau les lui recracha dans l’autre sens, et il pria très fort pour ne pas avoir tout compris de travers.
Son esprit mit tous les mots bout à bout, il il trouva la cran de s’exclamer avec force :

-Ah oui ? Alors comme ça, tu veux te mettre en couple, mais pas avec moi !

Red recula un peu, et Yama put recommencer à penser correctement.
Il fallait agir, là, maintenant ! Reprendre le contrôle de la situation ! il était sensé être l’homme, bon sang, le truc fort! Et de surcroit, il trouvait que pour un futur capitaine, la commise s’était tout de même bien fichue de lui.
Allez Yama, spontanéité ! Il fallait qu’il trouve une idée, là, maintenant, tout de suite, qu’il passe de proie à prédateur, qu’il sauve sa crédibilité !

-Et tu essaies de faire quoi en reculant comme ça, lança-t-il d’une voix qu’il voulait assurée.

Il avança à sa rencontre, la prit par les épaules, et la fit reculer jusqu’au mur d’en face histoire de lui couper toute retraite, pencha son visage sur le sien, et l’embrassa.
Ah, sûr qu’elle allait moins faire la maligne !

[Tu l'auras cherché, le Yamounet ! Bon sang, ce rp, c'est pas "don't be sad", c'est plutôt "viole moi si tu peux" ! x)]

Quand une situation devenait trop bizarre, le cerveau de Red passait dans un mode qu'elle appelait "le mode Reflexe". C'est ce qui s'était passé quand elle avait frappé le Colonel Ross. En général, elle ne pensait plus comme une humaine jusqu'à ce que le "danger" soit écarté. Et malheureusement pour Yama, la partie Rakkuen de Red le perçevait actuellement comme une menace.
Elle n'eut conscience de la trajectoire de son poing que quand celui-ci percuta violemment les côtes du jeune homme, lui coupant ainsi le souffle. Elle réussit cependant à se retenir de lui envoyer un coup de pied dans les...tibias. Elle courut vers le canapé où elle se roula en boule le temps de reprendre ses esprits (et sa respiration accessoirement).
-Je suis désolée...
Elle leva la tête pour regarder Yama, tout en hésitant entre être gênée et être en colère contre elle-même.
-Je me comporte vraiment comme une idiote. Surtout avec toi.
Elle passa une main dans ses cheveux, agacée.
-J'aurai dû me contenter de te remercier pour ce que tu as fait et au lieu de ça, je me suis moquée de toi et on s'ai mis dans cette situation...bizarre. Et dire que j'en veux au capitaine sous prétexte qu'il se moque complètement de ce que peuvent ressentir les gens alors que moi, je ne fais pas mieux !
Elle ramena ses genoux contre elle. Sa propre attitude la rendait perplexe. Elle n'avait pas voulu que cette situation dérape à ce point, sinon elle serait descendue avec les autres... D'un autre côté, le jeune homme aussi c'était peut être un peu emballé. On avait pas idée d'embrasser des inconnues de cette façon ! Même si ladite inconnue vous avait laissé entendre que ça ne la dérangeait pas...
Elle se prit la tête entre ses mains.
-Je fais vraiment n'importe quoi, des fois ! Et dire que je voulais juste un ami ! Rien de plus ! Les humains, vous êtes vraiment compliqués !

Yama fut ravi de faire connaissance avec la partie Rakkuen de Red. Enfin, dans l’absolu, si on lui avait laissé le choix, il aurait probablement préféré faire cette rencontre dans un contexte moins... percutant qu’un coup de poing dans les côtes.

Pourtant soldat, le jeune homme n’avait rien vu venir du tout, et, le souffle coupé, il manqua se mordre la langue dans une tentative désespérée d’abreuver ses poumons en air.
Vif, il lança son bras en avant pour empêcher Red de lui mettre un second coup, ce qui fut parfaitement inutile, vu qu’elle n’avait pas l’air d’en avoir l’intention. En revanche, il vit son pied bouger légèrement, et l’hybride grimaça comme si... elle se battait contre elle même.

Yama voulut prendre sa main pour la retenir, mais Red lui fila entre les doigts comme un courant d’air, pour aller se rouler en boule sur le canapé.
Ah bah pour de l’effet, il lui avait fait de l’effet !

Il se maudit lui-même et son soit-disant sens de la spontanéité, qui le mettait toujours dans des situations plus délicates les unes que les autres.
Une fois de plus, il essaya de se projeter à la place du capitaine. Hum, bon, la capitaine n’aurait jamais embrassé Red. Mais dans une situation comme celle-ci, que lui aurait-il dit ?
Il lui aurait probablement dit d’assumer, et de ramasser les morceaux. Sans confirmation possible, Yama décida de le tenter. Il voyait mal comment il pourrait encore empirer la situation.

-Je suis désolée, fit-il d’une voix qu’il voulait douce. Je suis un crétin, pas vrai ?

Il parlait autant à Red qu’à lui-même.

-Je sais bien que je n’ai pas la trempe que j’aurais voulu avoir. Enfin... Ça va aller, d’accord ?

Il lui aurait bien asséné qu’elle l’avait cherché, qu’après tout il n’était qu’un homme qu’un autre, et qu’il était désolé s’il avait embrassé la fille qui s’était collée contre lui avec des sourires équivoque.
les hommes ne parlaient définitivement pas la même langue...
Oui mais voilà, crier sur Red alors qu’elle n’avait déjà pas l’air bien ne lui semblait pas la meilleure option. Et puis après tout, c’était tout de même franchement de sa faute, alors c’était aussi à lui de prendre sur lui et d’assumer.

-Je crois qu’on est tous les deux fatigués, Red.

Il s’approcha d’elle, et la souleva dans ses bras avec douceur. Pas comme il aurait porté une fiancée où une petite amie, plutôt comme il aurait agi avec une enfant à consoler.
Heureusement pour lui, la jeune fille était légère comme une plume.
Il avança vers la porte de sa suite, qu’il ferma derrière lui, et s’engagea dans le couloir désert.
Red avait fermé les yeux. Yama lui souffla :

-Je te ramène dans ta cabine. Ne t’en fais pas. J’ai suffisamment joué à l’idiot pour ce soir.

À peine fut-elle dans les bras de Yama qu'elle ferma les yeux. Pourtant ce n'était pas à cause de la fatigue, loin de là. Elle avait un vertige maladif issu de son côté Rakkuen (et elle remerciait sa mère pour le cadeau d'ailleurs) qui faisait qu'elle paniquait dès qu'elle était à deux centimètres du sol et qu'elle voyait celui-ci. Du coup, elle avait préféré jouer la carte de la sureté. Elle estimait avoir fait assez de crises comme ça devant ce pauvre Yama.
-Je te ramène dans ta cabine. Ne t'en fais pas. J'ai suffisamment joué à l'idiot pour ce soir.
-Je ne m'inquiétais pas pour ça.
Le jeune homme sursauta légèrement en entendant sa voix. Il fallait dire qu'elle avait l'air endormie, les yeux fermés et sans parler.
-Qu'est-ce qui t'inquiètes, alors ?
-J'ai peur du vide.
Elle vit Yama hausser un sourcil en entendant sa réponse.
-Désolé, mais je n'ai pas compris ce que tu as dit.
Normal, elle venait d'utiliser la langue Rakkuen.
-Tant mieux, c'était assez embarrassant pour moi.
-On a déjà fait pas mal de trucs embarrassants cette nuit.
-Pas la peine d'en rajouter, alors.
-Sûrement.
Un silence s'installa.
-Euh...Red ?
-Hum ?
-C'est laquelle ta cabine ?
-C'est la 32. Au niveau des appartements des cuisiniers.
-Tu travailles à la cuisine ?
-Hum.
Yama continua de marcher. Avec le silence et le bercement régulier des bras du jeune homme, l'hybride manqua de s'endormir plus d'une fois. Soudain, son porteur s'arrêta.
-On y est !
Il la posa sur ses pieds et elle ouvrit la porte. Avant d'entrer, elle se retourna vers lui.
-Tu sais, à nous deux, on fait une belle équipe d'idiots...
Elle lui sourit.
-Je vais faire un truc, mais ne l'interprêtes pas comme autre chose qu'une amie qui te souhaite bonne nuit, d'acc ? Enfin si tu veux l'être, bien sûr.
Elle se mit sur la pointe des pieds pour le serrer à nouveau dans ses bras.
-Bonne nuit Yama. Et merci.
Elle rentra se coucher et s'endormit tout de suite.

Yama lui sourit sans ralentir le pas.

-C’est joli, comme langue.

Il avait entendu le capitaine parler Allemand, une fois où il avait trop bu. Alors oui, le Rakkuen, c’était une langue... sublime. Magnifique.
Il ne pouvait tout de même pas s’empêcher de se demander ce qui pouvait bien lui faire peur. Elle était tout de même dans ses bras, dans un vaisseau plutôt calme, silencieux, et même éclairé.
Il lui demanda de lui indiquer sa cabine, fut surpris d’apprendre qu’elle travaillait en cuisines. D’habitude, ceux au service de Masu n’étaient pas si... hum... doux.

Pour survivre avec la vieille et «délicate» cuisinière, il n’y avait guère que deux options. Soit il fallait crier plus fort qu’elle, soit il fallait être une espèce de roc qui pouvait encaisser les coups de couteau sans broncher.
Où alors, dans l’idéal, les deux.

À regarder la fragile jeune fille qui semblait presque endormie dans ses bras, il songea qu’elle cachait bien son jeu, et se promis de demander un de ces quatre à Masu comment elle s’en tirait en cuisine.
En fait, si ça se trouvait, il était en train de bercer une espèce de tueuse psychopathe adepte du couteau à Sushi !

Il leva les yeux au ciel, exaspéré par ses propres pensées. Il était temps qu’il aille se coucher, lui aussi.

-On est arrivés, lui signala-t-il.

Il la déposa sur ses pieds devant la porte, qu’elle entrouvrit.
Et quand elle se serra de nouveau dans ses bras, il lui adressa un large sourire.

-Alors moi aussi j’ai quelque chose à faire. Et ne t’en fais pas. On est amis. Rien qu’amis.

Il déposa avec gentillesse une bise sur son front, puis la laissa entrer dans sa cabine. Quelques secondes plus tard, alors qu’il ne s’était même pas encore éloigné, il vit par l’ouverture qu’elle avait laissé, épuisée, qu’elle s’était endormie.
Amusé, il entra sur la pointe des pieds, et déposa à côté de son poing fermé la livre croc blanc, qu’elle avait vu dans sa suite.

Puis il s’éclipsa en silence.
Cette soirée avait été une belle parenthèse, et malgré sa... boulette, elle lui laissait un agréable sentiment de plénitude.
Il s’étira et bailla un coup, avant de reprendre le chemin du pont. Il avait une passerelle à lessiver...

[Terminé !]